Overblog
Editer la page Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
/ / /
Dimanche 12 Juillet


Hier, j’ai passé un long moment à rouler avec un jeune pompier triathlète sortant de blessure. Ca m’a fait plaisir de discuter avec lui sur les routes tranquilles de la Meuse, moi qui ai passé 15 ans dans ce sport passionnant, très complet, mais exigeant. Sur le coup, ça m’a étonné, je n’ai réalisé que le soir, qu’en fait, son intérêt pour un cyclo-campeur était aussi professionnel. Je portais mon maillot bleu et jaune des cyclos cardiaques.

Effectivement, j’ai eu un matin de février 2005, le jour de la St Valentin, un petit infarctus. Sauvé par les pompiers et le Samu, les médecins en moins de 3h m’ont posé un petit ressort dans une des trois artères coronaires. Cela s’est bien passé, la récupération fut rapide, mais adieu la compétition, les cyclosportives et les Paris Brest. Ca change la vie et ça conduit 4 ans plus tard à parcourir la France en cyclo-camping.


Pluie la nuit et le matin, je pars à 9h15, avec l’éclaircie. La matinée sera consacrée à explorer le lac de Madine et la petite Suisse lorraine. C’est le 3° coup de cœur de mon voyage. Le lac ressemble au Der ou à la Forêt d’Orient en plus sauvage, ce qui est un compliment. Les touristes ne sont pas trop envahissants, le temps, peut-être. J’en fais le tour sur le chemin mixte, VTT et randonneur à pied, de belles perspectives, quelques oiseaux, la Butte de Montsec, le gag architectural local. Je me force à prendre les raidards de la petite suisse pour voir les très jolis villages, Martincourt, Gézoncourt, Griscourt.


Je fais halte à Pont à Mousson, ville à tampon pour le Carnet, je suis assez étonné de trouver une belle et attachante cité dans le contexte post industriel de la Lorraine, notamment la place à arcades triangulaires. Comme quoi, la reconversion peut passer par le tourisme, là, il y a de quoi faire. L’après-midi est consacrée à la longue traversée vers le Parc Régional de Lorraine avec vent favorable. A signaler la très bonne et très agréable route du Collet de Brides et la magnifique forêt du même nom, les nombreux villages très jolis, Grégling, Bourgaltroff, Bisping Belle Forêt. Pour ceux qui ne connaissent pas, soyez curieux, allez en Lorraine, vous serez surpris, et les gens sont si gentils. Le temps reste incertain et je roule souvent sous une bruine pas trop dérangeante.


Magnifique couchage dans la forêt près du Canal des Houillères. Question rencontres, 4 jeunes, avec une remarque, dans les bosses de la Suisse Lorraine et l’employé de l’office du tourisme qui discutera une demi-heure avec moi sur les différentes formes de cyclo-camping, lui préparant un voyage en Allemagne avec sa femme et… son chien. 133km.

Lundi 13 Juillet


Parmi les raisons qui m’ont fait choisir l’ensemble VTT et remorque plutôt que randonneuse avec sacoche, il y a la nécessité pour moi de prendre sans risque les pistes en terre, les voies cyclables ou les chemins de halage sans craindre la crevaison. J’ai donc choisi pour mon VTT de série Décathlon des pneus Swalbe Marathon renforcés en Kevlar. La section est plus grosse que les pneus de randonneuses, mais ils restent assez roulants quelque soit la surface. Cela me semble le bon compromis, les voies cyclables n’étant pas majoritairement bitumées, le tour du lac de Madine n’étant pas une exception, pourquoi s’en priver ?


Pluie la nuit, je commence à m’habituer, départ vers 8h30, tente toujours trempée. Je suis la voie cyclable en terre et bitume irrégulier du canal des Houillères sur une dizaine de km. Cette voie cyclable rejoint le réseau allemand vers Sarrebrücken, sur plus de 100km le long de la Sarre, c’est un axe privilégié pour descendre vers la Saône cyclable et les étrangers ne s’en privent pas, avec raison. Ce n’est pas connu des cyclos français, à tord. A Sarrebourg, je passe un peu de temps au Brico du coin pour réparer un des arceaux de ma tente que j’ai malheureusement cassé la nuit précédente, et j’attaque les montées vers Dabo. Le temps et les prévisions de la météo ne m’incitent pas à faire la route des crêtes des Vosges comme prévu, je connais, ce n’est pas grave. Va pour l’Alsace et des coins que je connais mal, le col de Valsberg (652m), la descente agréable dans la forêt sur une route sèche.


L’Alsace, ce n’est pas la France, de beaux villages bien léchés, géraniums et autres fleurs, belles maisons typiques, des voies cyclables partout, des vraies au milieu des jardins ouvriers. Magnifique malgré les averses. Je termine par la visite d’Obernai, typique de l’Alsace, je profite du soleil revenu pour faire des photos. Je ne vais pas plus loin que le camping, petite journée 95km.
Des mômes bordelais me colleront toute la soirée, follement intrigués par le matos de voyage, ils n’imaginaient pas cela possible, sympa.

Mardi 14 Juillet


Un bon exemple d’éloge de la lenteur, c’est ce qui m’est arrivé hier. Je montais très, très lentement le col après Dabo dans un paysage de conifères et de mousse sur le bord de la route, ça me rappelait quelque chose, j’ouvrais l’œil. Damned !! Mon œil est attiré par des points jaunes dans la mousse,.. Mais ce sont des girolles !! En vélo, c’est une première, j’ai ramassé les champignons, en ai retrouvé d’autres,.. Et ce fut un met de roi le soir à Obernai.


C’est la fête nationale et le déluge de pluie orageuse toute la matinée, heureusement, je ne suis pas sur les crêtes. Une petite accalmie me permet de remballer vite fait et de faire le sac de la remorque et en avant. Heureusement, l’eau est chaude, et la pluie ne pose pas de problème, surtout sur des routes assez vides de circulation. Barr, même avec l’orage, m’apparaît comme une superbe ville, mais pas de photos hélas. A Séléstat, je visite le centre de la vieille ville, moins jolie que prévu, le problème avec l’Alsace, c’est qu’on devient vite difficile. Neuf-Brisach possède une jolie place centrale carrée au milieu de rues rectilignes à la façon des bastides occitanes, sympathique, mais pas vraiment animée.

Je croise pas mal de familles allemandes en vélo, sans doute pour profiter des festivités. Moi, je vais faire l’inverse, faire l’impasse sur Colmar que je connais bien et passer l’après-midi à Freiburg pour visiter cette ville réputée comme une des plus écologistes d’Europe et son quartier Vauban. Du vide français, je passe au trop plein en traversant le Rhin. Ce sera une des deux découvertes majeures de mon voyage, l’autre étant la Camargue.


Une vingtaine de km me séparent de la ville. Evidemment, je me laisse guider par les routes cyclables passant par d’aussi beaux villages qu’en Alsace, Ihringen, Wassenweller, Gottenheim, les pistes passent à l’arrière des maisons et des fermes, ce qui permet de voir les potagers et les jardins. D’ailleurs, il est proposé aux promeneurs et aux cyclistes d’acheter des fruits et légumes en se servant tous seuls, l’obole due devant être versée dans une petite boite en métal, c’est difficilement possible dans notre pays. L‘arrivée sur Freiburg est un peu plus compliquée, mais je continue à suivre les panneaux indicateurs sans aucun problème. Le temps est repassé au beau.


A partir d’Umkirch, à 8km, il est proposé systématiquement à tous les automobilistes de laisser leur voiture au parking et de prendre un ticket mixte, parking et tram pour gagner le centre ville. Cette solution appliquée à Strasbourg devrait être généralisée systématiquement dans toutes les grandes villes françaises. Couplée au péage à l’anglaise, ou à l’interdiction stricte des voitures dans les villes en dehors de certains axes, ça supprimerait les embouteillages. Il faudrait bien sur multiplier les offres de transport en commun et investir dans les circulations douces, un peu comme les Suisses ou les Pays Nordiques.


Les vélos sont innombrables à Freiburg, pas besoin de vélib parce que tout le monde a son vélo. Le quartier central est un incroyable mélange de trams, de vélos et de piétons prenant les mêmes avenues, de façon assez anarchique et visiblement ça ne pose pas de problème. Des gros tas de vélos sont garés un peu partout avec des antivols en U, ça circule à tout va, c’est un peu Amsterdam, Copenhague ou Göteborg. Même à Paris, on est loin de tout ça. En voie propre, les trams roulent sur une pelouse, les rails sont à peine visibles. Un peu comme en Hollande, les quartiers sont constitués de petits immeubles, dans les rues, même si les riverains garent leurs voitures, c’est entre les arbres, et dans la circulation, la priorité est inversée, le piéton, le cycliste et en dernier la voiture. Le cyclo-campeur passe totalement inaperçu dans cette ville, sauf des touristes français, étonnant, non ?


Pour atteindre Vauban, quartier excentré de Freiburg, il me suffit de suivre le tram qui y va. J’ai intérêt à foncer, parce que lui ne traîne pas en route, pourtant, il s’arrête tous les 2 à 300m. Vauban, c’est un cas d’école d’urbanisme. Le quartier, assez grand a été pensé dans l’ensemble, pas d’architecture révolutionnaire pour les petits immeubles, par contre, les voitures sont exclues totalement et les habitants ont aménagé les espaces avec des jardins collectifs, des lieux de jeux pour les petits et de détente pour les grands. On voit des serres, des toboggans, des allées cyclables ou piétonnières non rectilignes. Chaque appartement à son balcon plus ou moins grand, ouvert ou fermé, mais toujours couverts de plantes, de fleurs, qui débordent largement sur les murs. Certains immeubles sont décorés, fresques ou puits de lumière, les mères de familles discutent dans l’herbe tranquillement, les gosses passent d’un coin à l’autre sans craindre le moindre accident. Chaque immeuble est différent, chacun peint d’une ou plusieurs couleurs, le bois est omniprésent, les escaliers sont souvent à l’extérieur, on ne voit que de la végétation et des fleurs. Je passe au milieu, je prends des photos sans attirer la moindre attention. Etonnant. Le tram passe dans la rue principale sur son tapis vert, les magasins du quartier sont sur l’avenue, avec une dominante bio. Tous les habitants sont à pied ou en vélo. Voyez les photos, c’est plus simple. C’est une merveille, à la fois humaine, architecturale surtout dans l’organisation du quartier. Cela suppose une gestion commune et une forte empreinte écologiste. Faut-il être un militant écolo pour penser les villes intelligemment ? Alors, qu’attendez-vous ?


18h, il est temps de partir, sinon je devrai prendre une chambre à l’hôtel, ce que je m’interdis, sauf cas de force majeure. Pas de camping en vue, autant rouler sur les pistes cyclables vers le sud le long du Rhin avec le vent dans le dos. Je m’arrête près d’un champ de maïs, 130km quand même. Il est 20h et l’orage menace. Dépêchons, ça va péter ! Un joli feu d’artifice naturel en prévision.

Partager cette page
Repost0

Présentation

  • : Jeanjo, voyageur cyclo campeur
  • : Rencontres, voyages, plaisir de l'intant, de la découverte, d'un bivouac en forêt, sur une plage....
  • Contact

Texte Libre

" Ne pouvant produire sans épuiser, détruire et polluer, le modèle dominant contient en fait les germes de sa propre destruction et nécessité d'urgence des alternatives fondées sur la dynamique du Vivant ".
Pierre Rabhi